Newsletter ANP3SM

NEWSLETTER #7

Décembre 2015

Améliorer les parcours de soins en santé mentale, un enjeu majeur pour demain
Selon une étude de l’université d’Oxford , les maladies psychiatriques réduisent l’espérance de vie au moins autant que le tabac. Les raisons de ce terrible constat sont aujourd’hui bien identifiées et on sait en particulier qu’il faut améliorer la prise en charge somatique de ces patients. Les récentes recommandations de bonne pratique en psychiatrie mettent en avant les points sur lesquels cibler les efforts pour que cela change : meilleure prise en compte de la iatrogénie, meilleur dépistage des situations à risque de décès prématuré, notamment sur le plan cardio-vasculaire et métabolique, recherche et traitement des comorbidités associées, prise en charge des conduites addictives, etc.
Ainsi, on sait ce qu’il faut faire pour améliorer la prise en charge somatique des personnes souffrant d’une maladie mentale, et pourtant les courbes d’espérance de vie ne rejoignent pas celles de la population générale, mais au contraire, elles auraient plutôt tendance à s’en éloigner. Un des principaux problèmes est certainement celui de l’accessibilité aux soins. On constate en effet très souvent que la reprise d’un suivi somatique à l’occasion d’une hospitalisation en milieu psychiatrique s’arrête aussitôt le patient sorti.
Consciente de cet enjeu, l’ANAP (Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux) a initié une réflexion sur les parcours des personnes en psychiatrie et santé mentale. Ce projet a pour ambition d’identifier les blocages observés sur le terrain à partir d’expérimentations menées depuis 2013 sur trois ARS (Auvergne, Bretagne et Nord-Pas-de-Calais) afin de pouvoir construire les parcours pertinents. Il en est ressorti des propositions d’amélioration autour de quatre thèmes principaux .

1 – Développer les connaissances et l’inter-connaissance : «la mise en œuvre de projets de formations croisées mêlant, lors d’apports théoriques et de stages, des professionnels de champs différents est ici apparue indispensable.»

2 – Articuler les interventions entre les acteurs de la ville, l’hôpital et les établissements et services sociaux et médico-sociaux : «développer des évaluations pluriprofessionnelles des situations des personnes autour de la question du handicap psychique, organiser une veille partenariale autour des perdus de vue, systématiser à la sortie d’hospitalisation les courriers au médecin traitant, etc. En bref, il s’agit de considérer tout recours ou épisode de soins comme un maillon d’une chaîne d’intervenants nécessitant par là-même des échanges d’information avec le médecin traitant ou l’intervenant suivant.»

3 – Mettre en réseau les acteurs du territoire : «il s’agit de développer les réseaux de relations pour faciliter par la suite les échanges, les contacts, des actions communes, bien au-delà du périmètre d’intervention de chaque acteur, jeter des ponts entre la sphère des acteurs du soin et la vie civile […] levier de déstigmatisation et de réhabilitation psycho-sociale.»

4 – Recalibrer l’offre structurelle : «là où la problématique des reconversions semble organiser la réflexion sur l’adaptation de l’offre, c’est bien autant sinon plus, la nécessité d’intensifier la coordination des interventions dans une perspective d’intégration qu’il s’agit de promouvoir. Par exemple, mettre en place une plateforme d’aide aux aidants.»

Le rapport conclut que, loin d’être une boîte à outils qui résoudrait tous les problèmes, ce projet a surtout eu le mérite de réunir autour de la table l’ensemble des acteurs concernés et de leur avoir permis de réfléchir eux-mêmes aux solutions à trouver pour mieux collaborer ensemble. Chaque territoire a en effet ses propres spécificités.

Docteur Cédric Bornes, médecin généraliste, PH Hôpital Maison Blanche, Paris

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[1] World Psychiatry. 2014 Jun;13(2) :153-60. doi :10.1002/wps20128.
[2] Comment améliorer la prise en charge somatique des patients ayant une pathologie psychiatrique sévère et chronique, recommandations juin 2015, FFP-CNPP
[3] Les parcours des personnes en psychiatrie et santé mentale, première approche, août 2015, ANAP

FOCUS

La santé buccale des patients souffrant de schizophrénie chronique : un problème de santé publique négligé

The oral health of people with chronic schizophrenia: A neglected public health burden. Wey MC et al. Aust N Z J Psychiatry. 2015 Nov 11

L’accessibilité aux soins bucco-dentaires pour les patients schizophrènes est un véritable enjeu de santé publique comme l’illustre cette étude récente publiée dans Australian and New Zealand Journal of Psychiatry.

L’étude a consisté à évaluer l’état bucco-dentaire d’une population malaisienne constituée de 543 patients schizophrènes chroniques. Les résultats ont ensuite été comparés aux relevés effectués en 2010 dans la population malaisienne générale. Il en ressort que l’index DMF (Decayed-Missing-Filled teeth), évaluant la part de dents cariées manquantes ou plombées chez ces patients, était de 20.5 soit environ le double de celui mesuré dans la population générale. Seul 1% de ces patients avaient des gencives saines.

Les auteurs concluent que les pathologies bucco-dentaires doivent mériter chez les patients schizophrènes la même attention que celle portée à leurs autres comorbidités somatiques. Ils suggèrent d’évaluer la santé bucco-dentaire de ces patients à l’aide de grilles standardisées qui pourraient ainsi être utilisées par des professionnels n’exerçant pas dans le champ de la dentisterie, de mettre en place des programmes d’aide à l’hygiène buccale, de promouvoir une meilleure prise en compte de la iatrogénie, notamment en matière de sécheresse buccale, et enfin de renforcer le suivi dentaire précoce.

Congrès ANP3SM 2016 → les 28, 29 et 30 juin 2016
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